Depuis la révolution née avec l’iPhone en 2007, les fabricants de téléphones portables n’ont cessés d’inover pour améliorer la prise de vue de leurs appareils, grignotant rapidement des parts de marché à leurs homologues spécialistes de la photographie.
Les volumes de vente et chiffres d’affaires des différentes compagnies du monde de l’image ont fondu comme neige au soleil. Il est passé de 120 millions en 2008 à seulement 20 millions en 2018, et cette chute touche toutes les catégories d’appareils, les réflex, les hybrides et les compacts ! Bref, le gâteau à partagé a considérablement diminué.
Il y a plusieurs raisons qui expliquent cela, la première étant la façon dont on consomme le visuel de nos jours. 99% d’entre nous nous contentons de prendre des photos qui demeurent à l’état numérique, que l’on partage sur les réseaux sociaux ou que l’on consulte simplement sur l’écran de notre téléphone ou de notre tablette, parfois encore sur celui un peu plus grand de notre ordinateur. Rarement en partage sur la télé.
Avant l’arrivée du numérique, on achetait une pellicule de 12, 24 ou 36 poses. Une fois qu’on l’avait terminée, il fallait la (faire) développer et faire (faire) des tirages sur papier pour en profiter. Chaque étape avait un coût, on faisait donc plus attention à ce que l’on photographiait.
Depuis qu’on est dans le monde des images digitales, tout ce dont on a besoin c’est de l’espace de stockage. On peut faire « shooter » autant que l’on veut, cela ne coûte rien, cela ne prend pas de place dans des albums qui prennent la poussière, et plus on en fait, plus on a de chances d’en avoir des bonnes.
Et c’est là qu’est le paradoxe, toutes les marques de matériel photo vendent moins d’appareils et pourtant nous n’avons jamais autant fait de photos que maintenant ! Cela grace aux cellulaires, ces rectangles électroniques qui tiennent dans nos poches et nous accompagnent tout au long de nos journées. Ces téléphones dont les performances photographiques ont tellement progressées en l’espace de quelques années, qu’il est donné à tout le monde de faire une belle photo de nos jours, cela sans avoir à se soucier de quoique ce soit, avec l’aide de l’intelligence artificielle.
Si beaucoup d’appareils photo sur le marché ont des programmes intelligents, les fabricants de cellulaires repoussent le concept à des niveaux bien plus élevés, grace à la puissance de leur processeurs. Et comme il se vend des centaines de millions de téléphones mobiles, leurs compagnies ont les moyens d’avoir d’énormes budgets de recherche et développement, faisant ainsi progresser l’ère de la photographie informatique conçue par des algorithmes.
Nous sommes d’ailleurs rendus à une évolution de ce les professionnels pratiquent depuis longtemps, le « braketing » qui consiste à prendre une ou deux photos sous-exposées, une bien exposée, et une ou deux sur-exposées. Ce système a donné naissance il y a quelques années déjà au système « HDR » qui va aller chercher de la matières dans les zones sombres et les zones claires des clichés. Quand c’est fait subtilement, cela donne des résultats superbes, mais c’est souvent trop poussé et artificiel. Mais voilà que les derniers cellulaires utilisent maintenant le concept pour pouvoir faire des photos de nuit sans flash, et la gamme d’iPhone Pro avec sa fonction « Deep Fusion » prend 9 photos pour les mixer ensembles afin d’offrir une profondeur inégalée en une fraction de seconde.
Et progressivement, au fur et à mesure que les processeurs le permettent, les fonctions vidéo bénéficient des progrès faits dans le domaine de la photo.
Bref, au final, nombreux sont les consommateurs qui ont abandonné leur matériel photo dans un coin, s’ils ne l’ont pas vendu, et qui se contentent désormais de leur téléphone mobile, compagnon de tous les instants. Portabilité, simplicité et connectivité sont devenus les besoins de Monsieur et Madame tout le monde, et c’est justement ce que les cellulaires offrent.
Par contre, si l’usage est facile, la qualité n’est pas toujours optimale. Les « smartphones » offrent des résultats parfaitement adaptés à la résolution de nos écrans, mais lorsqu’il s’agit d’imprimer des tirages dans certains formats, cela en montre rapidement les limites.
Fort de ce constat, certaines marques ont commencé à proposer des accessoires photo permettant d’optimiser la qualité. Les fabricants d’appareils ont eux changé leur fusil d’épaule pour convoiter les vrais passionnés de l’image. Le marché le plus condamné est celui des compacts avec des capteurs de moins d’1 pouce qui a été complètement cannibalisé par les téléphones. Ceux ayant des capteurs d’1 pouce se vendent encore un peu, mais cela se limite seulement à quelques modèles offrant des caractéristiques et des zooms que ne sont pas en mesure d’offrir les cellulaires physiquement parlant. Les capteurs Micro 4/3 ont eu leur temps de gloire jusqu’à il y a peu, leur grande force était la stabilisation d’image directement sur ceux-ci qu’il n’était pas possible de gérer correctement sur les capteurs plus grands en raison de la vitesse des processeurs, mais on peut désormais le faire sur les formats APSC, et cela s’en vient sur les pleins formats. Malheureusement pour Panasonic, ils ont tout misé sur ce format. Leurs derniers boîtiers sont très bien fait, mais leur autofocus est très moyen, et les prix sont trop élevés. La compagnie rencontre une nouvelle fois des difficultés financières et essaye de vendre certaines de ses divisions (dont celle qui fabrique les capteurs). L’autre compagnie qui a joué la carte du Micro 4/3, c’est Olympus. Leur dernière gamme est superbe, mais là encore, c’est un flop côté ventes parce qu’on trouve des produits à capteurs plus grands pour des prix similaires dans d’autres marques. Il y a beaucoup de rumeurs de faillite autour de la marque qui laissent entendre qu’elle ne survivra pas à 2020 !
En fait, le contexte actuel est beaucoup plus dur pour certaines compagnies car elles ne travaillent que dans ce domaine. D’autres ont la chance d’être diversifiées dans différents secteurs, ce qui leur permet de continuer à investir dans la recherche et le développement afin d’évoluer et aller se chercher une clientèle. C’est le cas de Sony par exemple, qui a été la première marque à miser sur les hybrides. La marque a du coup un grand choix de lentilles qui sont par contre pour beaucoup, un peu vieilles technologiquement parlant. Sony propose un excellent autofocus, par contre, beaucoup pensent que la marque arrive à un moment où il faut faire un choix concernant sa monture qui a été conçue pour des petits capteurs. Alors soit les ingénieurs vont réussir de faire une nouvelle gamme de lentilles capables de rester sur la monture actuelle en ayant des capteurs plein format, soit ils repartent sur une toute nouvelle gamme de boîtiers et objectifs, ce qui n’est jamais plaisant pour les consommateurs, mais qui est un mal nécessaire, et comme Canon et Nikon ont commencé à embarquer plus sérieusement dans ce domaine, il va falloir réagir rapidement.
Bien qu’ayant sorti une nouvelle monture, Nikon ne rencontre pas les ventes espérées. Le carnet de route de produits à venir n’emballent pas les amateurs. En fait, les produits proposés sont plus grand public que l’offre de Canon. L’autofocus n’est pas aussi performant, les lentilles moins lumineuses… Le seul point où Nikon a pour le moment une petite avance, c’est côté vidéo, mais il semble que sont concurrent de toujours soit à la veille de s’y mettre sérieusement aussi. Les deux marques proposent des modèles APSC, mais leur cheval de bataille demeure le Plein Format. Là où Canon a beaucoup déçu d’ailleurs, c’est de proposer plusieurs boîtiers dans ce formats, certains très bons, mais avec seulement quelques objectifs très basiques. Par contre, ils ont fait l’inverse pour leur hybride Plein Format, avec un boîtier qui passe tout juste le test, mais des lentilles d’une qualité incroyable… ce qui ouvre la voie vers l’arrivée de nouveaux boîtiers qui vont corriger les erreurs de la première série.
Enfin, la marque que j’ai adopté l’an passé après l’avoir longtemps observée, Fujifilm. Au lieu d’aller se battre contre ceux qui dominent le marché de certains types de capteurs, Fuji a décidé de ce concentrer sur ceux que les autres délaissaient, et de proposer essentiellement du matériel haut de gamme, un design un peu « vintage » et une finition irréprochable. Au final, la marque propose toute une gamme d’appareils au format APSC et quelques uns en moyen format. Elle fait ça tellement bien que beaucoup de photographes dont moi, qui utilisions du Plein Format, avons changé pour travailler en APSC ! Les résultats sont superbes, le matériel est plus petit et moins lourd, et c’est aussi plus abordable. Si il y a une gamme de lentilles maison assez complète, on rencontre le même problème qu’avec Sony, certaines sont un peu dépassées et mériteraient une nouvelle version, en fait cela a déjà commencé. Mais bon, tout dépend aussi du type de photos que l’on fait et comment on travaille. Enfin, Fujifilm fait preuve d’une belle transparence sur ce qui s’en vient, on sait généralement un ou deux ans à l’avance ce qui devrait sortir de leurs tiroirs, ce qui permet parfois d’éviter d’acheter un produit et d’avoir la mauvaise surprise de voir son remplaçant arriver peu de temps après.
Mes propos sont basés sur la lecture ou l’écoute de différentes sources. Si vous êtes en réflexion vers quel type de matériel vous tourner, j’espère que cela vous aidera en partie. N’oubliez pas, qu’il est préférable d’avoir un boîtier moyen avec des très bons objectifs que l’inverse. Bien sûr, si vos moyens le permettent, n’achetez que du très bon, mais ce n’est pas le matériel ce qui fera de vous un bon photographe, c’est votre maîtrise de celui-ci.